Déclaration de Jean Asselborn à l'occasion du 70e anniversaire de la déclaration Schuman

Il y a 70 ans, le 9 mai 1950, Robert Schuman, qui était alors le ministre des Affaires étrangères français, prononçait la déclaration qui est depuis considérée comme un des textes fondateurs de la construction européenne. L'approche conçue par cet artisan visionnaire de la construction européenne, né à Luxembourg en 1886, est à la fois pragmatique et graduelle: "L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble: elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait", déclarait ainsi Robert Schuman au sortir de la Seconde Guerre mondiale.

 

Lors du Conseil européen de Milan en 1985, les chefs d'État et de gouvernement ont décidé d'instituer le 9 mai comme "Journée de l'Europe". L'an dernier, le Luxembourg est le premier État membre à en avoir fait un jour férié.

 

Chaque anniversaire est l'occasion de célébrer le chemin parcouru ensemble, mais aussi d'évoquer les défis qui se présentent. Cette année l'exercice est aussi difficile que la situation est grave: une violente crise sanitaire, doublée d'une crise économique et sociale d'une ampleur inégalée, s'abattent sur le monde entier, et l'Union européenne est frappée de plein fouet.

 

Dans cette épreuve, la solidarité que Robert Schuman appelait de ses vœux reste le maître mot. À ce titre, je me réjouis des nombreux gestes généreux qui témoignent d'une solidarité concrète qui sauve littéralement des vies, des premiers efforts visant à atténuer l'impact de cette crise, notamment sur le plan social, et des premières décisions qui vont permettre de mettre en place un plan de relance pour que l'économie européenne, durement frappée, puisse se relever dans les meilleures conditions possibles.

 

Mais je m'inquiète aussi devant les nombreux domaines où cette solidarité fait encore cruellement défaut. C'est l'esprit européen qui est mis à l'épreuve lorsque les frontières intérieures sont fermées, entravant la libre-circulation des personnes, des services et des biens, provoquant par endroits des scènes de discorde et de méfiance que l'Europe n'avait plus connu depuis des décennies. C'est le fondement même de notre Union qui est mis au défi lorsque les frontières réapparaissent dans nos régions et dans nos esprits.

 

C'est pourquoi nous avons besoin, maintenant, de la "solidarité de fait" évoquée il y a 70 ans par Robert Schuman. Nous devons d'urgence redonner un sens au concept même de citoyenneté européenne en rétablissant pleinement le système Schengen et le marché unique. Nous devons d'urgence nous donner les moyens financiers pour affronter les retombées économiques de cette crise, surtout dans les pays les plus durement atteints. Nous devons aussi repenser les capacités d'action de l'Union européenne en matière de crise sanitaire. Et finalement nous devons nous opposer à toutes les atteintes à l'État de droit et défendre nos valeurs fondamentales.

 

Je porte en moi l'espoir que l'Union européenne sortira non seulement indemne, mais peut-être même grandie de cette douloureuse expérience.

 

Communiqué par le ministère des Affaires étrangères et européennes

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